Mise au point sur le F-35 qui serait soi-disant prêt pour la production en série

Le DDPS affirme dans un commentaire sur un article de CH Media: « la déclaration de la conseillère nationale Franziska Roth selon laquelle le F-35 n’est pas prêt pour la production en série est fausse. » Mais celui qui a tort, c'est le DDPS. Le F-35 n’a toujours pas atteint le stade de la « Full Rate Production » (FRP). Par Pierre-Alain Fridez et Franziska Rot
Le DDPS affirme dans un commentaire sur un article de CH Media: « la déclaration de la con-seillère nationale Franziska Roth selon laquelle le F-35 n’est pas prêt pour la production en série est fausse. » Mais celui qui a tort, c’est le DDPS. Le F-35 n’a toujours pas atteint le stade de la « Full Rate Production » (FRP). Par Pierre-Alain Fridez et Franziska Roth.

Le F-35 continue d’être produit en statut de production initiale à faible taux (« Low rate initial production » LRIP) pour le moment, car le Pentagone considère que le contrat avec Lockheed Martin pour le développement du F-35 n’est pas terminé. Tant que les travaux de développement se poursuivent et que le Pentagone souhaite évaluer les résultats par des tests approfondis, il ne peut conclure avec Lockheed Martin aucun contrat à prix fixe (« fixed-price contract ») pour des raisons juridiques[1]. Cette question est importante, car le DDPS affirme à plusieurs reprises qu’il existe des prix contraignants pour le F-35. Ce n’est pas le cas. Dans un futur incertain, cela pourrait devenir possible aux États-Unis sur le plan légal. Mais pas aujourd’hui.

Le grand groupe médiatique Bloomberg vient de confirmer une fois de plus que le F-35 n’est toujours pas prêt pour la production en pleine série : « dans une déclaration, le bureau des tests du Pentagone a réitéré son avis selon lequel la simulation est nécessaire dans le cadre des tests légalement requis avant que Lockheed, basé à Bethesda, dans le Maryland, puisse commencer la production en série. Sur une flotte potentielle de 3 000 F-35 ou plus pour les États-Unis et les clients internationaux, 720 ont déjà été livrés. Ceux-ci devront peut-être être réadaptés en fonction des résultats des tests. »[2]

En d’autres termes : étant donné que le stade de production en série n’a pas été atteint intégralement, il existe un risque sérieux que les 720 F-35 déjà livrés doivent être rappelés ou révisés. Tous les pays acheteurs, y compris la Suisse, sont confrontés à ce risque.

Le problème de l’absence du stade FRP de la production a donné lieu à d’intenses discussions durant de nombreuses années. En 2017, l’US Air Force a même envisagé de se passer des 108 F-35 qui avaient été livrés en premier, car le rappel et la rectification ultérieure des défauts découverts entre-temps seraient trop coûteux, comme le rapporte Alex Hollings de Sandboxx-News :

« En réalité, il s’agissait de construire des F-35 avant qu’ils n’aient été entièrement testés, puis de dépenser des milliards de dollars pour réparer les vieux jets une fois les tests terminés. En 2017, le problème était devenu si grave que l’Air Force a commencé à envisager d’abandonner les 108 premiers F-35A qu’elle avait reçus (et les 21,4 milliards de dollars qu’elle avait dépensés pour eux) simplement parce que les réparer aurait été trop coûteux. Fin 2020, Lockheed Martin a une fois de plus reporté la production en série, en raison d’une longue liste de problèmes à résoudre qui perdurait. »[3]



En juillet 2021, l’organisme de contrôle de l’action gouvernementale américaine (Government Accountability Office, GAO) a indiqué que le programme F-35 comptait encore 872 déficiences non résolues en novembre 2020. C’est en fait deux de plus que ce que Lockheed avait annoncé en mai 2020 (870). Il s’agit de toutes les déficiences qui ont trait au non-respect des exigences et/ou qui concernent la sécurité, l’adéquation et l’efficacité.

Le GAO distingue deux catégories de déficiences :

  • Les déficiences de catégorie 1 sont critiques et peuvent compromettre la sécurité ou une autre exigence. Les déficiences critiques de catégorie 1 du F-35 ont même augmenté de deux, passant de neuf à onze, entre mai et novembre 2020.
  • Les déficiences de catégorie 2 sont celles qui pourraient entraver ou limiter la bonne exécution du contrat. Il y en avait 861 en novembre 2020[4].

FORCE Technology, une société mondiale de conseil et de services technologiques fondée en 1940, a signalé le 9 novembre 2021 que Lockheed Martin avait corrigé en juillet 2021 quatre des onze défaillances particulièrement critiques identifiées en novembre 2020. Il reste donc sept déficiences particulièrement critiques de catégorie 1.

C’est l’une des principales raisons pour lesquelles le Pentagone n’est toujours pas disposé à reconnaître à Lockheed Martin le stade de production à pleine cadence (« Full Rate Production » FRP) défini par la loi. En fait, on en est encore loin, comme le note FORCE Technology[5].

Bloomberg a rapporté en juillet 2021 que, selon une nouvelle feuille de route, Lockheed Martin ne devrait pas être reconnu comme ayant un statut de production complet avant 2023 au plus tôt. Selon les premiers plans, ce statut aurait dû être atteint au plus tard en 2017. Mais la liste des lacunes est restée trop longue[6].

Ces listes de défauts font peser des risques techniques et financiers importants sur les acquéreurs des 720 F-35 déjà livrés. Les défauts de catégorie 1, en particulier, peuvent nécessiter le rappel et la réparation de l’ensemble des 720 F-35.

Toutes les affirmations euphémiques, étayées par des expertises de complaisance, que le responsable du programme F-35, Eric Fick, a présentées lors d’une conférence le 12 mai 2021, se sont donc révélées une fois de plus être de la simple propagande[7].

Au lieu de s’en référer à Eric Fick – la conseillère fédérale Viola Amherd et le chef de l’armée Thomas Süssli l’ont reçu à Emmen le 28 octobre 2021 – et au lieu de diffuser sa propagande, le DDPS ferait mieux de s’attaquer aux risques techniques et financiers importants liés au fait que le F-35 n’est pas prêt pour la production en pleine série. En effet, tous ces risques sont supportés uniquement par le pays de l’acheteur.

Le fait que le DDPS annonce publiquement que « la conseillère nationale Franziska Roth remet en question l’intégrité du Conseil fédéral » est ainsi tout simplement irrespectueux et à rejeter sous toute ses formes.

 

[1] US Department of Defense, Operation of the Defense Acquisition System, Instruction 5000.02, January 7, 2015, p. 47, https://www.acq.osd.mil/fo/docs/500002p.pdf

[2] « The Pentagon’s test office reiterated in a statement its long-standing view that the simulation is necessary as part of legally required testing before Bethesda, Maryland-based Lockheed can proceed with full-rate production. Of a potential fleet of 3,000 or more F-35s for the U.S. and international customers, 720 already have been delivered. Those may need to be retrofitted based on findings from the tests. »                
https://www.bloomberg.com/news/articles/2021-11-05/pentagon-can-t-say-when-lockheed-f-35-will-finish-combat-testing

[3] « In reality, it meant building F-35s before they’d been fully tested and then spending billions to go back and fix the old jets after testing was complete. By 2017, they’d become so serious that the Air Force began to consider just abandoning the first 108 F-35A’s they’d received (and the $21.4 billion they’d spent on them) simply because fixing them would be too expensive. By the end of 2020, Lockheed Martin once again postponed full-rate production, with a long list of issues yet to be resolved. » Alex Hollings, What went wrong with the F-35? Sandboxx News, 06.07.2021,         
https://www.sandboxx.us/blog/what-went-wrong-how-the-f-35-got-to-be-so-expensive/,            
le 27.08.2021 également publié en tant que vidéo: https://www.youtube.com/watch?v=PqSmSCFWCAw

[4] US Government Accountability Office (GAO), Report to the Committee on Armed Services, House of Representation, F-35 Stainment. DoD Needs to Cut Billions in Estimated Costs to Achieve Affordability, Washington July 2021 (GAO-21-439), p. 15s et annexe III, https://www.gao.gov/assets/gao-21-439.pdf

[5] The Trillion Dollars Fighter Jet in Big Trouble, FORCE Technologys, 09.11.2021, https://www.youtube.com/watch?v=qpqeccRepXA

[6] Anthony Capaccia, F-35 Closes In on New Timeline for Combat Test Once Set for 2017, Bloomberg, 12.07.2021,                
https://www.bloomberg.com/news/articles/2021-07-12/pentagon-nears-decision-on-key-f-35-combat-testing-simulation

[7] Frank Wolfe, Lack of F-35 Full-Rate Production Decision Provides “Launching Point for Criticism of Program”, 13.05.2021, https://www.defensedaily.com/lack-f-35-full-rate-production-decision-provides-launching-point-criticism-program-peo-says/air-force/

Interlocuteur-trices sur ce thème

Partager l'article :

Facebook
Twitter
LinkedIn
Animation laden...Animation laden...Animation laden...

Newsfeed

Questions sur l'adhésion

Tu as des questions concernant l'adhésion ou le formulaire d'adhésion ? Nous sommes à ta disposition pour t'aider.

Principales questions relatives à l’adhésion

Tu trouveras ci-après nos réponses aux fréquentes questions relatives à une adhésion.
Si tu n’y trouveras pas les renseignements souhaités, n’hésite pas à prendre contact. Nous nous réjouissons de ta prise de contact.

Le plus simple est de remplir dès maintenant le formulaire d’adhésion sur internet (à gauche).

Bien sûr ! Il n’est absolument pas nécessaire de posséder le passeport suisse pour pouvoir adhérer au parti.

Au PS, nous sommes d’avis que quiconque vit en Suisse, doit pouvoir donner son avis sur la politique suisse. S’il n’est pas encore possible de participer aux élections et/ou votations sans la nationalité suisse, tu peux, par contre, participer à l’élaboration de la politique défendue par le PS !

Il y a plusieurs niveaux et possibilités de s’engager au PS. Si tu veux être actif-ve au niveau local, l’engagement auprès de la section de ta commune de domicile ou de ton quartier est recommandé.

C’est aussi le lieu le plus adapté concernant ton engagement pour une fonction publique ou un service au sein de l’administration (Conseil communal, commissions scolaires, services sociaux etc.)

Tu peux également faire valoir ton savoir et savoir-faire en exerçant une fonction interne au parti. Le PS est heureux de pouvoir accueillir des personnes désireuses de s’engager dans l’organisation du parti et ce, à tous les niveaux (communes, districts, canton, commissions thématiques).

Le point de départ d’une candidature sera toujours ta section locale. Il suffit de manifester ton intérêt auprès des responsables de ta section. C’est la section qui nomme les candidat-es du PS aux fonctions publiques.
Ta section locale est également partie prenante, de façon souvent décisive, dans le processus de nomination interne au parti concernant les candidatures au gouvernement cantonal par exemple, ou au Grand Conseil.

Aucune, excepté ta cotisation. Il est souhaitable de partager nos valeurs et nos convictions. Ceci ne t’ oblige pas à partager l’intégralité des positions du PS.

Les membres JS ont la possibilité d’adhérer gratuitement au PS jusqu’à l’âge de 26 ans. Une demande correspondante peut être envoyée par courriel à [email protected].

Important à savoir

Ce que tu peux attendre du PS.

Tu es au plus proche de la vie politique : nous t’envoyons nos newsletters ainsi que notre magazine des membres « socialistes » six fois par an. Tu peux ainsi entrer en contact avec des personnes qui partagent tes idées.

Tu peux profiter des connaissances et compétences d’autrui et faire valoir et partager les tiennes, à différents niveaux au sein du parti. Ensemble, nous pouvons créer un avenir meilleur !

Pas de démocratie sans formation. Nous te proposons des webinaires et des séminaires passionnants sur des questions d’actualité et des sujets politiques brûlants.

La défense de nos valeurs nécessite des moyens financiers. Le PS, pour ses actions et son travail politique, compte surtout sur l’engagement de ses membres.
Les cotisations des membres sont fixées, différemment, par les partis cantonaux et les sections locales et dépendent de ton revenu imposable. Nous suivons nos propres exigences politiques : celle ou celui qui gagne peu, paie peu, et celle ou celui qui gagne beaucoup, participe davantage aux coûts du parti et sa politique.

En règle générale, les cotisations annuelles sont de l’ordre de 80 CHF pour les personnes à faible revenu et progressent à quelques centaines de francs pour les personnes à haut revenu.

Ces cotisations sont perçues annuellement.