La TVA est source de débats inépuisables sous la coupole fédérale, et le dossier ne cesse de revenir sur le tapis, tant il est difficile en matière fiscale de concilier les intérêts des un-e-s et des autres. Lors des consultations sur la TVA, tous les milieux plaident pour un taux unique… mais avec bien entendu une exception sous forme de taux préférentiel pour leur branche. Une véritable cour de récréation !
La TVA a été introduite en 1995 avec un taux normal et un taux réduit. Un an plus tard, le secteur de l’hôtellerie obtenait déjà un taux spécial, intermédiaire aux deux précédents, actuellement de 3,8%. Ce taux particulier, qui devait être temporaire, perdure. Et désormais c’est le secteur jumeau de la restauration, imposée au taux courant de 8% qui vient compliquer le débat, en réclamant une réduction au nom de la concurrence déloyale de la vente d’aliments à l’emporter, imposée au taux réduit de 2,5%.
L’initiative de Gastrosuisse est à rejeter absolument le 28 septembre, comme l’ont d’ailleurs fait tant le Conseil national que le Conseil des Etats sans lui opposer de contre-projet. La restauration n’est pas en péril, et à l’instar du Conseil fédéral, j’estime qu’il n’y a aucune raison justifiant l’imposition de ses prestations à un taux réduit. La perte fiscale s’élèverait au bas mot à 700 millions de francs par an pour la Confédération: une catastrophe lorsque l’on connaît la fragilité de l’AI, et les difficultés à venir de l’AVS, les piliers de nos assurances sociales largement financées par la TVA. Sans compter que cette réduction de la TVA nuirait aussi au personnel de la Confédération, car elle ferait planer la menace de suppression de postes.
Cette initiative arrive dans un contexte où les recettes fédérales sont déjà bien menacées par plusieurs révisions fiscales en cours (réforme des entreprises III, imposition des couples, suppression du droit de timbre, …). De plus, l’expérience en particulier à l’étranger a montré qu’une baisse de la TVA ne se répercute pas forcément sur les prix. Ce n’est que sur les grosses dépenses que la réduction de la TVA a un effet visible. En clair, l’économie est bien plus importante pour le caviar que pour la soupe aux légumes consommée au restaurant. Donc ce sont les classes favorisées qui profiteraient le plus d’une baisse de la TVA, alors que les personnes à revenus modestes ne pourraient toujours pas se permettre le luxe d’aller au restaurant.
Le gouvernement a d’ores et déjà mis en garde: il n’y a pas de marge dans le budget de la Confédération. En cas de oui à cette initiative, les pertes fiscales devraient être intégralement compensées dans le cadre de la TVA. Cela signifie que le taux réduit devrait être relevé, de 2,5 à 3,8%. Au final, les ménages à faibles revenus verraient leur facture augmenter, ce qui est contraire à l’équité sociale.