Pour des chantiers habités qui respectent les locataires

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :

Art. 1 Modifications

La loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l’emploi), du 25 janvier 1996, est modifiée comme suit :

Art. 43, al. 1 (nouvelle teneur)

1 Le propriétaire a l’obligation d’informer au préalable et par écrit les locataires et de les consulter en dehors de toute résiliation de bail, lorsqu’il a l’intention d’exécuter des travaux au sens de la présente loi, au plus tard au moment de déposer la demande d’autorisation. Il leur expose son projet et les informe de la modification de loyer qui en résulte. Il indique les dates envisagées de début et de fin de chantier et les phases de celui-ci. Il est également tenu de décrire le plus précisément possible la nature des travaux et les mesures envisagées pour atténuer les nuisances qui en résultent pour les habitants. Un délai de 30 jours au moins est imparti à ces derniers pour présenter leurs observations et suggestions éventuelles. Le propriétaire organise, sauf circonstances exceptionnelles, une séance d’information durant lui auront été communiquées.

Art. 43A Information des locataires durant le chantier (nouveau, l’actuel art. 43A devenant l’art. 43C)

1 Pendant toute la durée du chantier, le propriétaire informe par écrit les locataires de l’évolution des travaux et du calendrier de ceux-ci. A minima, il affichera le calendrier dans les espaces communs des habitations et le tiendra à jour.

2 Le propriétaire désigne aux locataires une personne de contact apte à renseigner ces derniers concernant le déroulement du chantier. Pour les immeubles de plus de 10 logements, il est tenu de recourir aux services d’un assistant à maîtrise d’ouvrage qui identifie les contraintes et les attentes des locataires durant le chantier et garantit la prise en considération de celles-ci par le maître d’ouvrage durant tous les travaux.

Art. 43B Suivi du chantier (nouveau)

1 Lorsqu’un chantier se déroule dans un immeuble habité, le propriétaire veille à limiter au strict minimum les nuisances qui en découlent pour les locataires, afin de préserver leur cadre de vie et leur santé. En particulier, il veille à garantir des plages horaires durant lesquels les travaux n’ont pas lieu, de 18h à 9h et de 12h à 14h. Il assure pendant toute la durée du chantier l’état de salubrité du bâtiment notamment en procédant à des nettoyages fréquents. Il assure durant tout le chantier la sécurité des personnes et des biens en identifiant les travailleurs qu’il autorise à accéder à l’immeuble pour les besoins du chantier.

2 Le Conseil d’Etat précise, par voie réglementaire, les principes qui, en sus de ces trois règles, permettent de garantir l’objectif visé à l’alinéa 1. Il s’inspire des meilleures pratiques en matière de gestion et de suivi de chantiers.

3 En cas de violation des règles de suivi du chantier, le département peut en imposer le respect directement auprès des entreprises œuvrant sur le chantier et mettre en place les mesures aux frais du propriétaire.

Art. 2 Entrée en vigueur

Le Conseil d’Etat fixe la date d’entrée en vigueur de la présente loi.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames et
Messieurs les députés,

Les chantiers se multiplient à Genève. Les immeubles se couvrent d’échafaudages. Derrière ceux-ci vivent des locataires dont le cadre de vie est souvent bafoué.

Durant les années 1960-1970, d’importants ensembles résidentiels ont été construits pour accueillir une population en hausse : Etoile-Palettes (1966), Le Lignon (1967 et 1971), La Gradelle (1961), etc.

Ces immeubles, qui souvent n’ont pas été bien entretenus depuis leur construction, sont ou doivent être rénovés. Les bailleurs – surtout les assurances et les caisses de pensions – cherchent des placements. Les obligations de la Confédération ont des taux d’intérêt nuls ou négatifs, tout comme les avoirs placés à la Banque nationale (–07,5%). L’immobilier
genevois, en situation permanente de pénurie, permet des rendements élevés au détriment des locataires. Les loyers continuant d’augmenter, les perspectives sont réjouissantes pour les bailleurs qui cherchent dès lors à investir dans la rénovation.

Les locataires sont protégés contre les fortes hausses de loyer après travaux. La principale loi de protection des locataires (LDTR), dont l’ASLOCA est à l’origine, instaure un plafonnement ou une limitation des loyers après travaux durant 3 ou 5 ans.

Ni le droit du bail (CO) ni la LDTR ne protègent en revanche efficacement les locataires contre les nuisances découlant du chantier.

Si une partie de ces nuisances sont inévitables, d’autres ne le sont pas. Les locataires qui ont vécu de tels chantiers se plaignent d’une absence de suivi des travaux, de difficultés à obtenir des informations sur le calendrier des travaux, d’un niveau d’hygiène insuffisant dans l’immeuble, de vols, d’utilisations de machines très bruyantes à des heures indues.

La presse s’est régulièrement fait l’écho de chantiers qui ont mené la vie très dure aux locataires. Il en fut notamment ainsi à la rue Michel-Servet ainsi qu’à l’avenue de la Gare-des-Eaux-Vives. L’ampleur des nuisances et le nombre de personnes concernées appellent une réaction des autorités. Le Conseil d’Etat semble avoir pris conscience du problème. Ces nuisances, dont la durée peut atteindre plusieurs années, ont un impact sur la santé des locataires et représentent un problème de santé publique. Il en va en particulier ainsi pour les personnes âgées et les familles avec des enfants en bas âge.

Le projet de loi propose que les locataires soient correctement informés, ce qui leur permet d’anticiper les nuisances, partant de tenter d’en amoindrir les effets sur leur quotidien, leur santé et leur état psychique. Il prévoit également un suivi correct du chantier pour les locataires par la désignation d’une personne apte à les informer et, au besoin, réagir. Il en va notamment ainsi en cas de dégâts (inondation, etc.) ou de mauvaises coordinations des intervenants sur le chantier.

D’une manière générale, le projet de loi demande au bailleur d’avoir des égards pour les locataires et de limiter les nuisances au strict nécessaire, ainsi que d’aménager des plages horaires de répit.

Ce projet de loi est issu d’un travail collectif mené par l’ASLOCA et plusieurs associations de locataires. Il repose également sur une consultation, notamment de professionnels.

Au vu de ces explications, les signataires vous prient de faire bon accueil à ce projet de loi.

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Christian Dandrès

Ersteinreichung

14. Oktober 2019

Einreichungskanton

Genf

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