Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève vu l’article 160, alinéa 1 de la Constitution fédérale, du 18 avril 1999 ; vu l’article 115 de la loi fédérale sur l’Assemblée fédérale, du 13 décembre
2002 ;
vu l’article 156 de la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève, du 13 décembre 1985, considérant
- le résultat choquant d’une récente étude de Travail.Suisse, selon laquelle une femme sur dix en Suisse est licenciée à la suite de son congé maternité ;
- la durée de protection contre le licenciement de 16 semaines (art. 336c al. 1 let. c CO) trop courte et ne permettant pas de protéger suffisamment les mères contre un licenciement abusif ;
- la difficulté pour les femmes d’intenter une action en justice pour faire valoir leurs droits dans de tels cas ;
- le fait que, outre les très faibles chances de succès de ces procédures, le montant des indemnités prévues par la loi est trop faible pour être réellement dissuasif ;
- la nécessité de protéger davantage les femmes à leur retour de congé maternité ;
- les motions et l’initiative parlementaire du conseiller national Mathias Reynard formulant des demandes et propositions pour améliorer la protection des femmes contre les licenciements au retour de leur congé maternité,
demande à l’Assemblée fédérale
- de faire le nécessaire pour augmenter les sanctions potentielles à l’égard des employeurs qui licencient une mère pour cause de maternité ou de grossesse ;
- de procéder aux modifications législatives nécessaires afin d’améliorer et d’étendre la durée de protection légale des mères à leur retour au travail, afin de les protéger vraiment contre le licenciement pour cause de maternité ou de grossesse, notamment en inversant le fardeau de la preuve, en augmentant le nombre de mois de traitement auxquels une femme a droit en cas de licenciement abusif ou en permettant d’imposer leur réintégration à leur employeur,
invite le Conseil d’Etat
- à soutenir cette résolution ;
- à mettre en place une campagne d’information auprès des femmes, notamment dans les maternités de notre canton, pour les informer de leurs droits et les orienter, en cas de besoin, vers des organismes susceptibles de leur octroyer le soutien nécessaire pour qu’elles puissent faire valoir leurs droits.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames et
Messieurs les député-e-s,
Différentes enquêtes récentes montrent qu’en Suisse, dix pour cent des femmes sont licenciées après leur congé maternité. Cette tendance est en augmentation depuis quelques années.
L’étude analysant les jurisprudences cantonales relatives à la LEg réalisée en 2017 pour le Bureau fédéral de l’égalité dresse le même constat inquiétant : sur les 130 décisions judiciaires soumises aux expertes, 41 (soit 31,5%) portaient sur une discrimination liée à la grossesse ou à la maternité. Dans 33 cas, soit dans 80,4 pour cent des affaires, l’employée était licenciée. Et dans près de la moitié des cas (46%), la discrimination intervient au retour
au travail.
En outre, en cas de licenciement pour cause de maternité ou de grossesse, la sanction maximale prévue par le droit suisse actuel est le versement par l’employeur d’une indemnité équivalent au plus à 6 mois de salaire.
Selon l’étude précitée, la sanction moyenne infligée à l’employeur en cas de licenciement discriminatoire correspond à 5,7 mois de salaire. Force est de constater qu’elle n’est absolument pas dissuasive. Cette situation est incompréhensible et choquante. Et la protection donnée par le droit du travail actuel n’est clairement pas suffisante.
En Suisse, la durée de protection contre le licenciement est de 16 semaines (art. 336c al. 1 let. c CO), étant précisé que le congé maternité minimum est de 14 semaines. Les mères bénéficient ainsi finalement d’une protection maximale de 2 semaines à leur retour au travail. Dans les faits, la plupart des femmes cessent leurs activités professionnelles durant une
période dépassant le seuil légal. En effet, la moitié des mères reprennent leurs activités au moins 22 semaines après la naissance. Dès lors, dans la plupart des cas, l’employée ne bénéficie d’aucune protection contre le licenciement à
son retour au travail.
En comparaison internationale, la durée de protection des mères à leur retour au travail est de 10 semaines en France, 4 semaines en Belgique, 8 semaines en Allemagne et en Autriche. Notons que ces deux pays connaissent également la possibilité pour les parents de bénéficier d’un congé parental avec garantie d’emploi à leur retour.
Au vu de ce qui précède, il y a lieu d’étendre la durée de protection légale en Suisse contre le licenciement des mères à leur retour au travail.
Nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les député-e-s, de réserver un bon accueil à la présente résolution.